Nos ambassadeurs Alexandre et Raphaël sont partis faire une incursion aux Aiguilles de Chamonix, plus précisément à l’Aiguille des Pèlerins, pour une belle goulotte : la Rébuffat-Terray (V 5 M, 550m).
Cette voie historique a été ouverte le 10 août 1944, par la célèbre cordée du moment, à l’époque. Avant d’être le compagnon de cordée de Louis Lachenal, c’est d’abord avec Gaston Rébuffat que Lionel Terray officiait sur les montagnes chamoniardes. On doit la version hivernale de cette très belle voie à la cordée Rab Carrington-Alan Rouse, les 7 et 8 février 1975.
Sur l’extrait du topo-guide Neige, glace et mixte, Tome 2, on lit : « Superbe itinéraire, devenu classique dans son genre. Aboutit au Col des Pèlerins (3275m) situé entre la Pointe des Pèlerins et l’Aiguille des Pèlerins. »
Le récit d’Alex et Raph
Une météo de rêve, des conditions parfaites et des températures plutôt clémentes ! Alors vous vous doutez bien, c’est en montagne que nous sommes allés ! Direction la goulotte Rébuffat-Terray, qui sort au Col des Pèlerins.
Ça faisait quelques temps déjà que l’idée de gravir cette voie nous trottait dans la tête. Je dirais même plus précisément depuis cet été, quand nous sommes tombés sur le topo de la goulotte, dans le livre, « Les 100 plus belles courses », de Philippe Batoux (notre livre de chevet pour tout l’été).
La goulotte se déroule plein nord, avec une magnifique vue sur toute la chaîne des Aiguilles Rouges. Cotée ED- (V 5 M, 550m, plus précisément), c’est une succession de passages en mixte, en neige collée et avec, de temps en temps, un peu de glace (fine !).
Ambitieux, je n’ai pas pris de raquettes (de toute façon je n’en ai pas, donc c’est réglé). Lors de la montée au refuge du Plan, je suis confiant pour l’approche de la voie du lendemain. C’est on-ne-peut-plus tracé, je commence déjà à me moquer de Raphaël qui, lui, les a prises les raquettes ! Finalement, c’est un petit peu moins fier que, le lendemain matin, je ferai la trace pour aller jusqu’au pied de la goulotte, et que je le maudirai par la suite, en le voyant gambader devant, avec ses raquettes (« Alors ça va Alex ? », me dit-il avec un grand sourire. Pas de commentaires !).
À l’attaque de la goulotte, Raphaël démarre dans la longueur mixte, à droite du départ initial. Les premièrs mètres se font dans du mixte pas évident, parfait pour finir de vous réveiller, mais la suite déroule bien.
Initialement, on devait faire la voie par paquets de 5 longueurs de suite en tête, chacun. Mais quand je rejoins Raph au premier relais, je craque et trouve une excuse bidon pour changer toute la stratégie : on grimpera en réversible. La raison en est simple : on vient d’avoir une paire de piolets Petzl Nomic tout neufs, et je suis bien trop impatient pour attendre de passer en tête dans 5 longueurs pour les essayer ! Le verdict tombe dès qu’on les a en main : c’est de la bombe, la frappe est folle et c’est sûr : impossible de tomber !
Les longueurs du début s’enchaînent plutôt vite et bien, ce sont des couloirs de neige qui se succèdent. Ils nous déposent au pied du premier ressaut : un mixte de neige et de glace très sympa, il faut déjà commencer à s’appliquer.
L’ambiance dans la goulotte nous fait plus penser à une falaise d’escalade qu’à de la montagne ! Nous sommes 3 cordées dans la goulotte, dont une de trois personnes ! C’est la fête au relais, nous ne sommes jamais seuls. Nous savions qu’elle était fréquentée, mais en pleine semaine avec la remontée de l’Aiguille du Midi fermée, on ne se serait pas doutés.
Les longueurs qui suivent sont de plus en plus raides et mixtes. Surtout une, dans un dièdre particulièrement lisse, que Raph gravira en se mettant très certainement « terreur » 10 mètres au-dessus d’un friend plutôt douteux (et tout ça parce que j’ai fait le relais à droite plutôt qu’à gauche, ça avait l’air plus joli). Même en second, je n’ai pas fait le malin…
Assurant Raphaël dans une des dernières longueurs, j’ai la sympathique surprise de voir des italiens rejoindre mon relais, initialement partis faire la goulotte « Beyond Good and Evil ». Ils ne continueront pas leur voie car les plaquages de glace sont inexistants. Ils se préparent donc un bon goûter, dont je profite bien ! Il fallait grimper plus vite Raph !
Encore deux très belles longueurs, dont la dernière qui ne fait vraiment pas rire. Imaginez-vous en escalade, grimpant une dalle lisse et sans prises, eh bien c’est exactement ça, mais avec 5mm de glace posés dessus, et une pointe d’acier bien affutée à la place d’une bonne gomme tendre de chausson d’escalade (un petit tremblement des mollets : interdit !). Voilà ! Le sommet est atteint ! Juste à temps pour profiter des derniers rayons de soleil avant que celui-ci ne disparaisse. Nous voici plongés dans l’ombre et dans l’ambiance austère, mais magnifique, de la face nord de l’Aiguille du Midi, qui se trouve face à nous.
La descente est plutôt cool : une dizaines de rappels 3 étoiles (la corde de 60 mètres est de mise), et nous revoilà assez vite au pied de la voie ! Le bilan est excellent, de très bonnes conditions dans l’ensemble, on ne s’ennuie pas une seconde dans cette voie « Rébuffat-Terray ». À consommer sans modération !
Topo de la voie Rébuffat-Terray
Vous trouverez le topo complet de cette belle voie mixte sur le site de notre partenaire Camp To Camp !
La voie Rébuffat-Terray en vidéo
Pour une lecture illimitée hors ligne, vous avez la possibilité de télécharger gratuitement cet article au format PDF :
Voie Rébuffat-Terray à l’Aiguille des Pèlerins par Alex et Raph
La répétition de la voie Beyond Good and Evil a fait l’objet d’un petit film qui a été diffusé lors du festival Montagne en scène